Incontournable de la gestion locative, l’état des lieux n’est pas à prendre à la légère. Pour s’assurer de sa fiabilité, il est utile de faire appel à un professionnel. Un des partenaires de Contigo.Immo, Nicolas Rommiée, expert immobilier chez Axis Experts, nous éclaire sur la question.
- Qu’est-ce qu’un état des lieux locatif ?
Nicolas Rommiée : « Un état des lieux locatif est la description détaillée d’un bien, avant l’entrée d’un locataire. Il est régi par l’article 1730 du code civil, et il est obligatoire. On peut comparer un état des lieux d’entrée à une photographie textuelle du bien, avant l’entrée du nouveau locataire. Il peut être réalisé soit entre parties (propriétaires et locataires), soit avec l’aide d’un expert. »
- Quand doit-il être effectué ?
N.R : « L’état des lieux doit être fait soit avant l’entrée du nouveau locataire, soit durant le premier mois d’entrée en vigueur du bail. Si on dépasse ce délai, le locataire peut refuser qu’il soit réalisé. Et ça, c’est risqué : sans ce rapport, on n’aura pas de base sur laquelle se fier à la sortie. Les dégâts engendrés par le locataire ne pourront donc pas lui être imputés, puisqu’on n’aura aucune preuve de l’aspect du bien avant son arrivée… L’état des lieux de sortie doit quant à lui être fait le dernier jour du bail, au plus tard. »
- Les législations sont-elles les mêmes partout en Belgique ?
N.R : « Avant 2018, le bail était régi par une loi qui datait de 1991. Mais depuis 2018, il s’est régionalisé et n’est plus une compétence fédérale. Cela a pour conséquence que les règles diffèrent légèrement entre les régions – en particulier en ce qui concerne l’état des lieux de sortie. Depuis 2018, les autorités ont créé des listes de répartition des réparations, travaux et entretiens impérativement à charge du bailleur ou incombant au preneur. »
- Quelle est la plus-value à faire appel à un expert pour un état des lieux ?
N.R : « L’expert est une personne extérieure, objective et neutre vis-à-vis de la mission. Il garantit un rapport d’expertise complet, précis, sans négligence et où tout est notifié.
Il arrive souvent que le propriétaire et le locataire réalisent l’état des lieux d’entrée entre eux, et voient ensuite leur relation se dégrader lors de l’occupation du bien. Cela mène à des situations conflictuelles et à des désaccords au moment de l’état des lieux de sortie. Grâce à mon œil extérieur, je peux alors concilier leurs avis pour maintenir une relation cadrée entre eux.
Mais il vaut mieux se protéger de ces situations en faisant appel à un expert dès l’entrée. Et pour cause : un état des lieux d’entrée mal réalisé peut être préjudiciable pour le propriétaire comme pour le locataire. Mon objectif est : zéro euro de dégât locatif au moment de la sortie. Cela évite des frais au locataire et permet au propriétaire de relouer directement. Ça arrange tout le monde !
Pour ce faire, nous proposons notamment ce qu’on appelle un ‘welcome pack’ : nous informons et conscientisons le locataire sur ce qu’il peut et ne peut pas faire. Nous remettons également aux parties une liste de conseils locatifs, pour que tout se passe pour un mieux.
D’un point de vue juridique aussi, l’intervention d’un expert amène de la sécurité, puisqu’il connaît les législations en place. Lorsqu’on réalise une expertise, on reçoit un ordre de mission qui valide notre intervention. Nous travaillons avec des documents-types qui encadrent l’état des lieux pour éviter tout litige par la suite. Et pour calculer l’ampleur des dégâts locatifs de manière objective, nous avons accès à des prix unitaires, qui ont été établis par des Commissions. »
- Comment choisir son expert immobilier ?
N.R : « Il existe deux types de profils capables de faire de l’expertise immobilière : les experts immobiliers et les géomètres experts. Mais au-delà du titre, ce qui est important, c’est que l’expert fasse partie d’une association de professionnels tels que l’UGEB (l’Union des Géomètres-Experts de Bruxelles), la Cibex (Chambre des experts immobilier de Belgique), ou encore l’ABEX (Association Belge des Experts). Quand on choisit l’expert avec lequel travailler, il est important de s’assurer qu’il fasse partie d’une association professionnelle, pour éviter de se retrouver avec un rapport d’expertise de mauvaise qualité. »
- Y a-t-il des règles, des cases à cocher pour réaliser un état des lieux ?
N.R : « Il n’existe pas de cadre réglementaire pour réaliser un état des lieux, la seule règle est qu’il soit bien détaillé. Un reportage uniquement photographique ne sera pas valable. Il doit contenir une description détaillée de l’ensemble des éléments qui constituent le bien.
D’un point de vue légal, en cas d’état des lieux de sortie, il est indispensable d’avoir un PV de sortie signé, afin que les parties puissent libérer les lieux. »
- Concrètement, comment procédez-vous sur le terrain ?
N.R : « La façon traditionnelle se fait au dictaphone. Sur place, on fait une description détaillée de l’ensemble des éléments et des équipements d’un logement, avec une structure précise. On commence par décrire les plafonds, les murs, les sols, ensuite les équipements, l’état d’amortissement. Y a-t-il des coups, des éclats, des griffes ? Nous passons le bien au crible pour remonter toutes ces informations dans le rapport d’entrée locative.
Au niveau des outils, le numérique se développe et tend à remplacer le dictaphone. Mais selon moi, dans la pratique, un rapport dactylographié au dictaphone est toujours de meilleure qualité qu’un rapport sous format numérique. »
- Sur Internet, il existe des formulaires-types d’état des lieux. Sont-ils fiables ?
N.R : « Non, s’y fier peut être très risqué. Dans ces inventaires, on retrouve des tableaux avec des cases à cocher : ‘cuisine : bon état, état moyen, mauvais état’. Mais qu’est-ce que ‘bon état’ signifie, au juste ? Ces termes sont trop subjectifs, et manquent de précision. Quand je me retrouve, en sortie locative, avec un rapport de mauvaise qualité, il arrive que je ne puisse pas réclamer son dû au locataire, même si les dégâts viennent de lui. Et ce, parce que le rapport manquait de précision au départ. Pour maintenir les droits de chacun et éviter les litiges, il est donc pertinent de faire appel à un expert dès le départ.
En fait, on peut considérer qu’un état des lieux d’entrée, c’est le document qui va permettre de préparer le futur état des lieux de sortie. D’où l’importance de ne pas le négliger ! »